Guerre du Golfe (1990 – 1991)

Contexte général

Conflit ouvert par l’invasion du Koweït par l’Irak le 2 août 1990, la seconde guerre du Golfe a suscité une vaste riposte menée par les États-Unis avec l’aval du Conseil de sécurité de l’ONU. C’est l’opération « Bouclier du désert », qui a mobilisé une coalition de 32 autres pays. L’offensive proprement dite a duré 42 jours, du 17 janvier au 28 février 1991. L’embargo à l’encontre de l’Irak, décidé par l’ONU dès 1990, a duré douze ans et eu des conséquences sanitaires et sociales catastrophiques sur la population irakienne. L’insurrection des opposants chiites et kurdes au régime de Saddam Hussein, encouragée par la coalition, a provoqué une répression sanglante et un exode massif vers les frontières.

 

Après l’invasion du Koweit, les forces en présence

Les origines de la guerre du Golfe

La guerre Iran-Irak a marqué les esprits par sa durée, 5 ans, et sa violence, un million de morts ! A l’issue de ce conflit, aucune des deux nations n’est vraiment déclarée vainqueur ou vaincue. Le bilan humain, financier et politique est catastrophique des deux côtés.

Cet échec, aux conséquences financières dramatiques, pousse Saddam Hussein à chercher des compensations auprès des voisins arabes, auxquels il réclame en particulier l’annulation de la dette irakienne. Créancier important de l’Irak, qui lui doit quelque 15 milliards de dollars, le Koweït entretient avec Bagdad des relations de plus en plus tendues au cours de l’année 1990. Un litige territorial remontant à la colonisation britannique conduit Saddam Hussein à revendiquer des modifications de frontières…

Opération Bouclier du Désert

2 août 1990 : L’Irak envahit le Koweït. Alors que le monde condamne cette invasion, les satellites américains découvrent 4 divisions irakiennes en direction de l’Arabie Saoudite. Informé dans la nuit de ces mouvements de troupes irakiens, George Bush, arguant d’une « menace irakienne imminente » contre les « intérêts vitaux de l’Occident », ordonne l’envoi dans la région de forces navales, terrestres et aériennes. « Nous ne sommes pas en guerre, a-t-il annoncé, mais nous avons tracé une ligne dans le sable. Cette ligne, Saddam Hussein la franchira à ses risques et périls. » L’Espagne, l’Italie et l’Allemagne garantissent le ravitaillement et la logistique du corps expéditionnaire américain…

 

 

Type de mandat : vote de l'ultimatum par le Conseil de sécurité

Les forces en présence

 

Vote de l’ultimatum par le Conseil de sécurité de L’ONU
29 novembre 1990 : le Conseil de sécurité de l’ONU vote la résolution 678 qui rend légitime l’emploi de la force contre l’Irak, et fixant au 15 janvier 1991, minuit, l’ultimatum après lequel les membres des Nations unies seront habilités à contraindre par la force les troupes irakiennes à évacuer le Koweït occupé.

Missions et moyens engagés

Opération Tempête du Désert

Opération Tempête du Désert

17 janvier 1991 : En direct sur CNN, l’aviation alliée lance contre l’Irak la plus grande attaque aérienne de l’Histoire. L’Irak riposte en bombardant Israël, en attaquant l’Arabie Saoudite, en provoquant une marée noire dans le Golfe et en incendiant les puits de pétrole du Koweït.

Après six semaines de bombardements, l’armée irakienne est écrasée. Les Alliés en profitent pour lancer une offensive terrestre foudroyante.

En quatre jours seulement, l’armée irakienne est balayée et le Koweït est libéré… Le bilan est lourd pour l’Irak : 100.000 morts et un pays en ruines. Mais Saddam Hussein reste au pouvoir…

Les puits de pétrole en feu

Pays impliqués

Trente-quatre pays regroupant près de 940 000 hommes, sous commandement américain :

Etats-Unis (535 000 hommes) ; Arabie saoudite (118 000) ; Turquie (95 000) ; Emirats arabes unis (40 000) ; Royaume-Uni (36 000) ; Egypte (35 000) ; Oman (25 000) ; Syrie (21 000) ; France (19 000)…

Dates-clés
1990. 2 août. Invasion du Koweït par l’Irak.
29 novembre. Résolution 678 du Conseil de sécurité autorisant le recours à la force à partir du 15 janvier 1991.

1991. 17 janvier. Début de l’opération « Tempête du désert ». Un cessez-le-feu a lieu le 27 février, après l’évacuation de l’émirat par les troupes de Saddam Hussein.

Déroulement

On peut distinguer quatre phases :

  1. l’invasion du Koweït par l’Irak à partir du 2 août 1990 ;
  2. les préparatifs militaires alliés au cours de l’automne 1990 (opération Desert Shield, Bouclier du désert) ;
  3. la guerre proprement dite (opération Desert Storm, Tempête du désert), en 3 parties :
    1. – préparation aérienne (16 janvier-février 1991) qui permit l’attrition de 20 % des forces irakiennes, en deçà des objectifs prévus de 50 %;
    2. offensive des 100 heures (février 1991) (Bataille sur l’« autoroute de la mort »);
    3. sabotage des puits de pétrole par les soldats irakiens (25-27 février 1991).
  4. l’après-guerre : printemps 1991, massacre des kurdes et des chiites que la coalition avait incités à se révolter contre Saddam Hussein.

Effectifs des belligérants

Effectifs et équipements de l’armée irakienne au Koweït et dans la région :

Effectifs de la coalition : 938 545 hommes

  •  États-Unis : 535 000 hommes, 80 navires, 6 porte-avions, 2 navires-hôpitaux, des sous-marins, 1 350 avions, 1 500 hélicoptères, 1 000 chars d’assaut, 2 000 blindés, 1 800 pièces d’artillerie
  •  Arabie saoudite : 118 000 hommes, 21 navires, 145 avions, 550 chars d’assaut, 1840 blindés, 500 pièces d’artillerie
  •  Turquie : 95 000 hommes, 92 avions dont 42 envoyés en renfort par l’OTAN (surveillance de la frontière, n’a pas participé au combat)
  •  Royaume-Uni : 36 000 hommes (terre : 29000, air : 4000, mer : 3000), aidés de 78 avions, 80 hélicoptères, 23 navires, 180 chars d’assaut, 300 blindés légers et 76 pièces d’artillerie (SAS dans la guerre du Golfe)
  •  Égypte : 35 600 hommes (Corps expéditionnaire égyptien durant la deuxième guerre du Golfe), 300 chars d’assaut, 100 blindés légers, plusieurs pièces d’artillerie
  •  Émirats arabes unis : 40 000 hommes, confortés de 15 navires, 80 avions et 200 blindés
  •  Oman : 25 500 hommes, auxquels s’ajoutent 4 navires, 63 avions et 50 chars)
  •  Syrie : 20 800 hommes, 300 blindés
  •  France : 19 000 hommes (terre : 12 000, air : 1 160, mer : 2 400, réserves à Djibouti : 3400), 15 navires, 60 avions, 120 hélicoptères, 40 chars d’assaut, 100 chars légers, 600 blindés, 18 pièces d’artillerie (Opération Daguet)
  •  Koweït : 22 000 hommes, 30 avions (15 Mirage F1 CK1 et CK2 + 15 A4 SKYHAWK )et 34 hélicoptères
  •  Maroc : 17 000 hommes, quelques chars
  •  Pakistan : 10 000 hommes
  •  Allemagne : 5 navires, 18 avions, équipements radars déployés en Turquie dans le cadre de l’OTAN, divers équipements militaires envoyés en Israël pour sa protection (des blindés de détection de gaz toxiques, 10 hélicoptères, 2 sous-marins, des missiles, etc.) (n’a pas participé directement au conflit contre l’Irak)
  •  Bahreïn : 7 400 hommes
  •  Bangladesh : 6 000 hommes
  •  Canada : 2 700 hommes (Opération Friction : 3 navires, 37 avions, un Hôpital de campagne)
  •  Italie : 1 950 hommes, 5 navires, 22 avions
  •  Nigeria : 500 hommes
  •  Niger : 800 hommes
  •  Argentine : 900 hommes, 2 navires
  •  Australie : 600 hommes, 3 navires, 2 unités médicales
  •  Nouvelle-Zélande : 2 avions de transport, 1 unité médicale de 40 personnes
  •  Espagne : 500 hommes, 7 navires
  •  Sénégal : 495 hommes (dont 92 tués dans un crash d’un C-130 de l’armée saoudienne)
  •  Belgique : 400 hommes, 5 navires, 12 avions et des munitions pour les alliés (N’a pas participé aux opérations contre l’Irak, 12 F-16 en défense en Turquie.)
  •  Corée du Sud : 1 avion de transport, 1 unité médicale,
  •  Pays-Bas : 400 hommes, 3 navires, des équipements radars
  •  Grèce : 200 hommes, 1 navire
  •  Sierra Leone : 200 hommes
  •  Honduras : 150 hommes
  •  Hongrie : 1 unité médicale de 37 personnes
  •  Danemark : 1 navire, 1 unité médicale, des missiles déployés en Turquie dans le cadre de l’OTAN
  •  Norvège : 1 navire
  •  Portugal : 1 navire
  •  Pologne : 1 hôpital de campagne de 130 personnes, 2 navires-hôpitaux
  •  Roumanie : 1 hôpital de campagne de 360 hommes, 1 unité de décontamination chimique de 160 hommes
  •  Suède : 1 hôpital de campagne avec 525 personnes
  •  Tchécoslovaquie : 1 unité de lutte antichimique forte de 300 hommes, protégée par 37 soldats
  •  Singapour : 35 médecins militaires

La participation française : l'opération Daguet

Suite à l’invasion du Koweït par l’Irak le 2 août 1990, le président de la République française, François Mitterrand, annonce le 9 août l’envoi des forces de l’armée française, notamment du porte avions « Clemenceau » et des navires de la Marine nationale, afin d’assurer la protection du golfe persique. Il s’agit de l’opération « Salamandre ».

Mais quand le 14 septembre 1990, l’armée irakienne viole les lois internationales et investit l’ambassade de France à Koweït City, une nouvelle opération est mise en place : l’opération « Daguet ». Elle consiste en la participation d’une division française, la division « Daguet », à la coalition internationale investie contre l’Irak.

À partir de cette date s’enclenche l’opération Desert Shield (« Bouclier du désert ») qui marque une longue période de préparation des troupes avant l’offensive alliée baptisée Desert Storm (« Tempête du désert »). La coordination de l’opération est assurée par le général Michel Roquejeoffre. La Division Daguet est quant à elle commandée par le général Jean-Charles Mouscardès, du 22 septembre 1990 au 8 février 1991, date à laquelle il est remplacé pour raisons sanitaires, par le général Janvier. La division Daguet est composée principalement par la totalité de la 6e DLB (Division légère blindée), avec les renforts des 1er et 3e RHC (Régiments d’hélicoptères de combat), du 1er RI (Régiment d’infanterie), du 1er RHP (Régiment de hussards parachutistes), du 4e RD (Régiment de dragons) ou encore du 11e RAMa (Régiment d’artillerie de Marine). En plus de la 6e DLB, la division Daguet peut compter sur le GSL (Groupement de soutien logistique) de la FAR (Force d’action rapide).

« Bouclier du désert » est une phase stratégique importante pour l’armée française car elle mobilise plus de 16 000 soldats (dont 3 000 de réserve) et déploie des moyens techniques et logistiques impressionnants afin d’établir les camps de l’armée française au cœur du désert saoudien. Cette phase permet la participation sans encombre des soldats français à l’offensive des coalisés déclenchée le 17 janvier 1991. Après le lancement d’une puissante action aérienne visant à amoindrir les capacités de réaction ennemies et à garantir la maîtrise de l’espace aérien du théâtre d’opération, l’offensive aéroterrestre dite « éclair » permet en une centaine d’heures de mener les forces alliées au succès et à la reddition irakienne.

 

 

Résultats et bilan de l'intervention

Bilan humain et matériel

Victimes directes : Entre 30 000 et 100 000, selon les sources (surtout des civils), côté irakien ; près de 450 morts dans les rangs des coalisés.

Victimes indirectes : Plus de 100 000 « décès excessifs » (dont environ 70 000 enfants de moins de 15 ans) pour raisons sanitaires ; entre 30 000 et 60 000 personnes massacrées par les forces de Saddam Hussein lors des soulèvements chiite et kurde, déclenchés immédiatement après la fin de la guerre.

 

Une des particularités de la guerre est le nombre important de pays (34) y ayant participé, qui plus est, tous à l’encontre du camp irakien. Les besoins en pétrole satisfaisant un nombre croissant de pays, le paroxysme de l’anti-impérialisme, des mouvements pour la paix et la démocratie expliquent une telle intervention. Cela faisait plus de 23 ans et la guerre des Six Jours qu’aucune annexion ne s’était produite. La guerre civile libanaise touche à sa fin et l’URSS s’est retirée d’Afghanistan. De plus l’Union soviétique, et par ricochet, les États-Unis, membres du conseil permanent de l’ONU, cessent d’user de leur veto. Cette première en a fini des antagonismes Est-Ouest et se démocratise lentement dans le cadre de la perestroïka et de la glasnost. Les États-Unis tirent profit de sa décomposition pour montrer que le futur leader d’un monde unipolaire est proche de l’ONU et aspire à la paix et à la démocratie. La peur qu’un régime communiste profite de la guerre pour se mettre en place est inexistante chez les capitalistes, et réciproquement. Quant à l’arrivée d’un régime islamiste hostile  aux Occidentaux, la faible influence de l’Iran et les bonnes relations en façade entre la république islamique du Pakistan et les Etats-Unis la rendent peu redoutée.

Pour la France, le déploiement des forces terrestres et aériennes du dispositif Daguet en Arabie Saoudite s’est effectué avec rapidité à partir de septembre 1990. Les structures adaptées de l’armée de l’Air française lui ont permis en un bref délai de mettre en place un dispositif important et complet, engageant 55 avions de combat à 7 000 km de la métropole. L’aviation française s’est coordonnée avec l’aviation alliée, comportement obligatoire dans un espace aérien restreint où plus de 2 000 avions sortaient par jour. Le combat terrestre lancé le 24 février a permis d’atteindre sans faute les objectifs assignés et de parachever le succès de la mission française dans une coopération militaire effective au sein de la coalition alliée. Pendant les mois de mars et avril 1991, le détachement français poursuit ses opérations de déminage des plages de Koweït City. La première plage entièrement déminée par les sapeurs du génie parachutiste est inaugurée au début du mois d’avril, en présence du général Roquejeoffre et de Georgina Dufoix, présidente de la Croix Rouge française. Caractérisée par la décision du président François Mitterrand de ne pas faire intervenir les appelés du contingent et par sa volonté politique d’un engagement de la France soigneusement dosé, l’intervention française dans le Golfe a représenté un laboratoire du concept de modularité et a contribué à redéfinir l’outil militaire français à l’issue de la guerre froide, en l’orientant vers la professionnalisation des armées.

 

 

Sources et contributions photographiques

Sources :

Le monde diplomatique : guerre du golfe 1990-1991.

Wikipédia : guerre du golfe

Archives ECPAD

Contributions photographiques :

Vidéo compilation de photos opération Daguet